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Bertrand Cantat en tournée : pour et contre tout à la fois

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le Journal du Funéraire

Bertrand Cantat, ex chanteur de Noir Désir, était de retour aux Vieilles Charrues à Carhaix avec son groupe, Detroit. C’était sa première réapparition dans ce festival depuis sa condamnation pour meurtre. Moral ou pas ? Pour et contre

Annonce des Vieilles Charrues
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Ce qui se dit dans les pour (et qu’on ne veut surtout pas entendre)

Sur les réseaux sociaux, forums, commentaires d’articles etc… Il nous a été donné de lire des commentaires arguant, à différents degrés, du fait que Bertrand Cantat était moralement blanc comme neige, que Marie Trintignant était hystérique, qu’elle l’avait provoqué et qu’elle était seule responsable de ce qui lui était arrivé (voire elle l’avait cherché).

Nous invitons les commentateurs de passage que, quel qu’ait été le comportement supposé de Marie Trintignant, plutôt que de tenter de justifier des coups portés à une femme, ils feraient mieux de s’abstenir et de sortir prendre l’air. Essayer de faire les soldes pour s’y trouver un sens moral semble une bonne idée.

Pour

Tout le monde se souvient de cette triste affaire qui avait coûté la vie à Marie Trintignant et qui avait amené son compagnon, Bertrand Cantat, à une condamnation pour « meurtre commis en cas d’intention indirecte indéterminée » en Lithuanie, l’équivalent du « Coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner » en droit français.

Bertrand Cantat a purgé une peine de quatre ans de prisons, sur huit auxquels il avait été condamné, achevé son contrôle judiciaire, et se trouve, dit le droit, en règle avec la justice.

Son contrôle judiciaire avait d’ailleurs été particulièrement contraignant : Bertrand Cantat s’était vu imposer l’interdiction absolue d’évoquer l’affaire sous quelque forme que ce soit, voire même de répondre aux attaques virulentes de la famille et des proches de Marie Trintignant. Ce débat là, ne le refaisons pas : n’importe qui à leur place aurait tenu des propos très durs à l’égard du responsable de la mort de leur fille. Ce n’est pas seulement la prison qui a été infligée à Cantat, mais l’opprobre publique. Et aujourd’hui, il doit vivre avec sa conscience.

Cantat est un artiste. Chanteur, guitariste, auteur, compositeur, il s’est illustré avec le groupe Noir Désir, puis désormais avec Detroit. Nulle loi n’interdit à un homme qui a payé sa dette à la société de travailler, et surtout, nulle peine ne peut punir son public, demandeur d’œuvres, pour ce que l’artiste a fait.

Le public de Cantat demande des chansons, Cantat lui en donne, le public ne s’enfuit pas en courant : les chansons ne doivent pas être si mauvaises. Il faut, à un moment, faire le distinguo entre l’homme et l’artiste : l’un est peut être un type épouvantable, mais ce fieffé coquin ne doit pas éclipser le talent de l’autre et priver le monde de ses œuvres.

La justice est rendue au nom du peuple, et si le peuple n’est pas content de sa justice, il a le bulletin de vote, là n’est pas la question. Si la vision d’un Bertrand Cantat assassin se substitue à la vision (et l’audition) d’un Bertrand Cantat chanteur, libre également à chacun de cesser d’écouter ses disques et d’aller faire un tour à la buvette lorsqu’il joue. Les buvettes, aux Vieilles Charrues, ce n’est pas ça qui manque.

noir desirCe qui se dit dans les contre (et qu’on ne veut surtout pas entendre)

Le plus souvent lu dans les opposants au retour de Bertrand Cantat : il ne doit pas revenir parce que c’est un assassin et qu’un assassin ne doit pas être pardonné.

Outre le fait que ce soit aussi péremptoire que faiblement argumenté, qui parle de pardon ? Point question ici de pardonner quoi que ce fut, mais d’accepter qu’il a été puni pour ce qu’il a fait selon la justice rendue au nom du peuple. Si la justice ne punis pas assez selon le peuple, c’est un autre débat, dans lequel Cantat n’a rien à voir.

Contre

Ce qui interpelle dans l’oeuvre de Bertrand Cantat, ce n’est pas la beauté ou l’âpreté des mélodies, la subtilité des arrangements ou la poésie des mots. Ce qui frappe dans l’oeuvre de Bertrand Cantat, c’est sa portée politique, militante, et sa posture moraliste.

Bertrand Cantat est un artiste engagé à gauche, très à gauche. Son frère Xavier est le compagnon de Cécile Duflot, ancienne ministre de l’écologie, lequel frangin clame haut et fort sa haine de l’armée, du drapeau, voire de la simple idée de pays.

Chacun est libre d’avoir des idées et de les défendre dans des débats démocratiques, tout cela est bien tant que le suffrage universel direct a le dernier mot. Suffrage universel direct, parce qu’il y a beaucoup à redire sur la démocratie « représentative ». Mais je m’égare, je milite, vous voyez, nous avons tous nos convictions.

Justement, et je passe cette partie de l’article à la première personne parce que c’est un avis que n’engage que moi, mes convictions sont opposées à celles de Bertrand Cantat. Cela tient à une vision philosophique : d’un côté, une vision de gauche de l’humanisme, celle de Cantat, qui considère que le problème entre les gens est extérieur. Ce qui pose problème, c’est la disparité des richesses, les frontières, les possessions etc… De l’autre côté, une vision pessimiste, la mienne, qui considère que le problème vient de l’homme et de sa nature animale, et que si l’on distribue les richesses équitablement et que l’on supprime les garde-fous, la première chose que certains vont faire, c’est égorger leur voisin pour s’emparer de leur part.

Résumé, c’est d’un côté une vision de la vie en société garantie par la bonne volonté universelle, de l’autre, la vie en société garantie par la menace de la matraque en cas de débordement.

S’il m’arrive parfois de m’emporter dans mon militantisme, il faut reconnaître que Cantat a su se distinguer en la matière, entre le discours politique au sein même de ses chansons, jusqu’à l’insulte larvée, ce fameux « fascisme » sorti de sa réalité historique et qui dénonce aujourd’hui toutes les idées qui ne sont pas de gauche.

Le problème, c’est qu’en cognant Marie Trintignant, et accessoirement en la tuant, Cantat a décrédibilisé ses idées, et a (un peu) donné raison aux miennes. S’il n’y avait la morale et la police, qui empêcherait les forts nerveux de frapper les faibles qui les agacent ?

De sa posture vindicative et moralisatrice, Cantat est donc tombé dans sa chambre d’hôtel à Vilnius. S’il revient et clame encore ses idées, sa vision du monde et ses revendications, de quel droit lui nous fustigerai-t-il nous, citoyens exemplaires ? C’est sa cause qu’il desservirait, et, à travers elle, le nécessaire débat démocratique.

Je mitigerait tout cela en soulignant que Bertrand Cantat peut parfaitement revenir en tant qu’artiste s’il abandonne ce militantisme politique. Il lui resterait les chansons d’amour. Cela au moins ferait le régal des spécialistes de l’humour noir.

Et vous ?

Et vous, êtes vous pour ou contre ? N’oubliez pas, argumentez, réfléchissez, restez courtois. Pour le reste, les commentaires vous sont ouverts.

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