Lundi prochain, à la même heure, le résultat du premier tour des élections municipales sera connu. Le funéraire est il un enjeu qui puisse faire pencher la balance des indécis ? Personne, en tout cas, ne semble essayer…
Municipales sous haute tension
Le municipales de dimanche prochain auront lieu, de l’avis général, sous haute tension. Entre le gouvernement le plus impopulaire de la cinquième république et une opposition laminée par les affaires, les élus locaux risquent de payer les pots cassés de la politique nationale. Déjà par manque d’électeurs, puisque l’abstention promet d’être forte, ensuite en se trouvant battu alors que, la plupart du temps, ils n’y sont pour rien.
Le maire est avant tout un élu local, qui s’occupe de la gestion d’une commune. Les routes le concernent. L’installation d’un tramway, d’une médiathèque ou d’un gros équipement le concernent. L’ouverture d’un petit commerce pour ne pas que son village meure le concerne. La cantine scolaire le concerne. Un président qui ferait écouter un ex-président qui toucherait peut être de l’argent d’un dictateur mort ne concerne absolument pas le maire : on est au delà de son pouvoir et de ses préoccupations.
En revanche, le cimetière l’intéresse au plus haut point, de même que l’implantation d’équipements funéraires, un funérarium ou un crématorium par exemple. Et là, le journaliste de Funéraire Info aimerait se glisser dans la tête du maire sortant pour voir ce qui s’y passe.
Le paradoxe du cimetière
Curieusement, le cimetière semble, dans l’esprit des équipes politiques, pouvoir faire perdre un maire, mais pas le faire gagner. Bien entendu, ceci ne concerne pas toutes les communes. Ce n’est pas le Père Lachaise qui arbitrera le duel entre Mesdames Hidalgo et NKM. Mais gardons à l’esprit que la ville moyenne en France, c’est un bourg de 1700 habitants.
Et dans ce bourg, il y a un cimetière.
Ce cimetière peut faire perdre un élection. Cela peut sembler difficile à croire et pourtant : imaginez un cimetière mal entretenu, sans cases de colombariums pour recevoir des cendres de défunt, tellement vétuste et étroit qu’il est de plus en plus difficile d’y trouver une concession, et auquel il n’a pas été ajouté d’extension, mais un nouveau cimetière loin, très loin du centre-ville, entre l’usine de traitement du lisier et la bretelle d’autoroute.
Un cimetière mal entretenu donne, au moins à l’inconscient collectif, l’image d’un maire qui ne respecte pas les défunts de ses administrés, les être cher toujours trop tôt disparus, et, en somme, l’électeur se demandera quel sera le sort réservé à son corps une fois que sa mort l’aura exclu des listes électorales.
Cela peut largement suffire, dans une commune, à faire perdre au candidat à sa succession les quelques voix dont il pourrait avoir besoin pour regagner son bureau. Surtout si son bilan est mitigé ou neutre.
En revanche, il n’existe pas, à notre connaissance, d’exemple de maire ayant gagné les élections grâce à son traitement du funéraire. Et pourtant, nous n’avons pas ménagé nos efforts, à la rédaction, pour essayer d’en trouver un. Au débriefing, nous avons réalisé que nous n’en avons même pas trouvé qui avaient essayé.
Yeurs, ses commerces, son crématorium…
Dans l’esprit des électeurs, que la commune soit dotée d’un cimetière bien tenu et bien équipé, suffisamment spacieux pour que l’on soit certain d’y avoir une place pas trop loin de ses ancêtres, à la fois suffisamment proche pour qu’on puisse, à la Toussaint, aller du fleuriste à la tombe à pieds, et suffisamment éloigné pour qu’on ne soit pas obligé d’habiter en face, tout cela, va de soi. Un maire qui maintient son cimetière impeccable fait son travail de maire, un maire qui le laisse à l’abandon et le néglige, gare à lui dans les urnes !
Y adjoindre un employé qui l’entretient en usant de produits et technique écologiques, et l’électeur s’empressera de piquer des idées pour son propre jardin. Curieusement, personne, jamais ne se dit « Voilà un maire qui prend soin des morts, donc des ancêtres, donc de l’héritage de cette commune, et quiconque aime autant sa ville ne peut en prendre que grand soin ». C’est dommage.
Un jeu dangereux, par contre, est celui du crématorium : imaginons un territoire, comme il en existe encore, ou il ne se trouve aucun crématorium. Et un maire qui annonce fièrement : « il va y en avoir un, chez nous, c’est mon engagement ». Tout le monde s’attendrait à une manifestation de la population en liesse, suivi d’une réélection tenant du plébiscite. Pas à être battu à plat de coutures.
C’est néanmoins possible, si le candidat ne prend pas toutes les précautions pour que le projet soit bien présenté, en toute transparence. C’est déjà suffisamment difficile lorsqu’on est bien en place et libre de ses mouvements, cela devient périlleux lorsqu’on est en campagne et qu’un adversaire va frapper aux portes pour expliquer que le projet se fera n’importe ou, fera perdre une valeur importante au foncier, et surtout, coûtera une fortune au contribuable. L’on sait que c’est faux, mais le non professionnel du funéraire, lui, non.
Le cœur du côté du portefeuille
Globalement, un projet comme le crématorium ou une idée plus modeste, comme l’aménagement d’un carré cinéraire dans le cimetière, est rarement, voire jamais, mis en avant dans le programme des candidats aux petites et moyenne communes. Pour une raison simple : en cette période, le maire se rappelle que l’électeur et le contribuable sont souvent une seule et même personne, et freine sur tout ce qui pourrait passer pour des dépenses coûteuses et inutiles.
Ce que ce n’est pas : le contribuable, contrairement à ce que dit la légende, n’a rien contre le fait de payer des impôts, il râle contre le fait qu’il aie l’impression de payer pour rien. Et une amélioration du cimetière, ce n’est pas rien.
Mais tout ceci est suppositions et interrogations. Le mot de la fin revient au cadre d’une entreprise spécialisée dans les services aux cimetières, ne traitant qu’avec des municipalités, qui a tenu à garder l’anonymat. Cette personne nous explique donc que toutes les sociétés dont le fond de commerce sont les marché publics ne travaillent quasiment plus depuis six mois, puisque, à l’approche des élections, les élus suspendent tout. N’étant pas sûr de plaire, pourquoi prendre le risque de déplaire ?
Surtout que s’il n’est pas réélu, le maire sortant pourrait voir son projet de cimetière flambant neuf enterré par son adversaire devenu successeur, alors que la population le désirait. Un argument dont il pourra se servir à la prochaine municipale.
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